C’est 1 geste recent et minuscule mais qui s’est impose de facon spectaculaire dans nos vies : le swipe. Ines Garmon l’a elu comme theme d’etude, ce qui lui vaut d’etre l’une des laureates du Prix des Talents de la Recherche.
Ce concours fut cree par Rue89 et Fabernovel Institute Afin de mettre en valeur de jeunes chercheurs dont les travaux permettent de mieux saisir les transformations en cours au sein d’ notre societe virtuel.
Vous pourrez commencer via lire le travail [PDF] d’Ines Garmon ou par l’entretien qui suit, pour saisir ce que le swipe fera en nous.
Rue89 : Pourquoi vous etes-vous interessee au swipe ?
Ines Garmon : J’me suis interessee a J’ai maniere dont les mecs utilisaient Tinder. En interrogeant des volontaires et en les observant choisir l’application, d’abord des amis et des amis d’amis, J’me suis rendu compte qu’il y avait quelque chose de fort dans ce geste : plusieurs y voyaient un geste de mise a fond, tel on leve ou on baisse le pouce aux jeux du cirque, d’autres une gifle, une caresse ; on m’a aussi parle d’une machette permettant de se « frayer 1 chemin dans la jungle qu’est Tinder ».
Selon les utilisateurs, le geste pouvait donc etre charge en puissance, en joie, en quelque chose d’erotique, de ludique… J’ai trouve tres interessant qu’autant de representations differentes et d’affects si forts soient contenus dans un si petit geste, si anodin en apparence.
Pouvez-vous decrire le swipe de Tinder ?
Le profil d’une personne reste propose a l’ecran : on peut le Realiser disparaitre en le faisant glisser vers la gauche, ou l’aimer en le faisant glisser par la droite.
Ce swipe hybride quelques geste. Il s’appuie sur le geste traditionnelle qu’Apple a invente en sortant l’iPhone : faire defiler lateralement votre objet, votre profil, en touchant l’ecran. Il ressemble aussi au geste de lecture, Lorsque l’on tourne des pages, puisqu’on feuillette ici les profils comme on passerait nos pages d’un catalogue. Cela evoque aussi le geste qu’on fait si on manipule des cartes a jouer. Mais le swipe de Tinder se differencie du swipe qu’on fait pour faire defiler des photos : ici, le retour en arriere reste impossible, on fera des choix irremediables.
Est-ce que chacun swipe d’une aussi maniere ?
Plusieurs utilisateurs ont une pratique reflechie : ils se concentrent, regardent desfois le profil et gui?re seulement la photo. Mais on voit aussi 1 usage tres ludique, bon nombre comparent alors Tinder au jeu sur internet 2048. Il s’agit de faire defiler les profils, de choisir tres promptement, oui ou non, en les faisant glisser vers la gauche ou par la droite. Quelques etablissent un premier conseil en fonction d’un seul critere (« est-ce que les cheveux me plaisent ? »), a toute vitesse.
En outre, cela peut dependre moins de l’utilisateur que de le etat d’esprit au moment ou il l’utilise. Le swipe peut etre mesure, installe, reflechi, si l’utilisateur est en pleine requi?te, aussi qu’il peut etre irreflechi, frenetique, dans la meme journee, au moment babel dating web d’une pause cigarette ou en attendant le train.
Pourquoi est-ce que le swipe nous parai®t intuitif ?
C’est un geste qui se comprend tres facilement. Il semble d’abord intuitif etant donne qu’il tire parti des differents gestes qu’il hybride et que l’utilisateur a incorpores. Si on mobilise un angle d’approche anthropologique, Marcel Jousse explique beaucoup qu’on construit une rapport au monde selon la droite et la gauche. Culturellement, l’aspect droit reste d’ordinaire celui qu’on assigne a ce qu’on prefere.
Au reel aussi, on gere des espaces de cette maniere. Sur Tinder, on fonctionne exactement comme le fait 1 directeur de casting qui trie des Polaroids via une table : il place a gauche des photos qu’il souhaite ecarter de son champ de vision, a droite celles qu’il veut conserver.
J’ai trouve que c’est votre geste assez science-fictionnel, presque magique : on a l’impression de manipuler de l’exterieur un objet du dedans, on a vraiment l’impression d’avoir une prise sur lui puisque c’est semiotise, c’est a penser traduit en indices, a l’ecran : au moment ou l’utilisateur fera bouger le profil, celui-ci reste comme « attache » a le doigt.
Legerement tel dans cette scene de « Minority Report » ou Tom Cruise, qui joue le personnage de John Anderton, saisit, manipule, fait jouer avec une certaine virtuosite des reves des « precogs » sur son ecran. Ce geste jouit donc d’un imaginaire seduisant.
Sur Tinder, la dimension tactile du geste tactile joue beaucoup. Avec une souris sur un ecran d’ordinateur, on n’aurait nullement vraiment la aussi experience. La, tout se marche tel si on traversait l’ecran.